Une boisson fermentée saine et rafraîchissante pour l’été

Damaster/ juillet 20, 2021/ Non classé

Je parle très souvent du microbiote intestinal durant mes consultations ; de son importance majeure pour la santé et de son implication dans la survenue d’un grand nombre de maladies. Il est important qu’il soit en bonne santé et bien diversifié, autrement dit qu’il contienne une grande variété d’espèces de bactéries qui fonctionnent harmonieusement ensemble. Des perturbations de cet équilibre, qui sont fréquentes, ont un impact énorme sur notre bien-être.

On parle assez fréquemment de l’importance de nourrir les bonnes bactéries du microbiote par des fibres (fruits et légumes…) et beaucoup de personnes pensent immédiatement aux probiotiques quand on aborde ce sujet. Si ces derniers ont un certain intérêt dans des conditions particulières, il est encore plus intéressant de les apporter par le biais d’aliments qui ont été naturellement fermentés.

La lacto-fermentation des légumes était une pratique très fréquente avant l’avènement des réfrigérateurs. Cela avait de multiples avantages. Une étude récente a du reste montré qu’un régime de 10 semaines riche en aliments fermentés permettait d’améliorer grandement la diversité de ce microbiote et de baisser le niveau de 19 protéines impliquées dans l’inflammation, alors qu’un régime riche en fibres seules n’avait aucun impact, du moins sur cette durée (lien vers l’article original, en anglais).

Je prépare et consomme moi-même régulièrement des aliments fermentés, mais je souhaitais cette année concevoir une boisson fermentée agréable à boire, pour l’été. Je voulais également qu’elle ait des effets positifs sur certains problèmes du microbiote intestinal et notamment qu’elle limite le développement de certaines levures comme le candida albicans, qui ont tendance à proliférer de façon excessive avec notre alimentation trop riche en sucre, alcool et levures en général. Or, certains aliments fermentés peuvent contenir des levures, ce qui participe à encourager cette prolifération.

Il y avait aussi d’autres impératifs (outre le goût agréable et ces effets sur la santé) : elle devait notamment être vite préparée et réussir à tous les coups, sans risque de contamination. J’ai réussi à réunir toutes ces conditions au premier essai, ce qui est une chance. Voyons maintenant comment préparer ce breuvage : cela commence par l’élaboration d’une culture concentrée de lactobacilles (des probiotiques), que nous pourrions appeler une mère. Elle servira de source de bonnes bactéries pour que la boisson finale soit vite prête et ne risque aucun accident de fermentation (comme une contamination par des bactéries indésirables ou des levures).

Préparation de la culture de lactobacilles

Pour préparer notre mère, il faut procéder exactement comme on le fait pour fermenter des légumes, à ceci près qu’ils sont remplacés par de la menthe poivrée, que j’ai choisie à la fois pour la fraîcheur et pour atteindre les objectifs microbiologiques :

  • Prenez un petit bocal à fermeture mécanique, avec un joint pour l’étanchéité ; stérilisez-le en le plongeant un moment dans de l’eau bouillante et ressortez-le sans le sécher.
  • Faites bouillir en parallèle 1 litre d’eau dans lequel vous aurez ajouté 1 cuiller à soupe de sel. Ce sel va servir à inhiber le développement des bactéries autres que les lactobacilles, ce qui est préférable pour que la fermentation réussisse quand on part de zéro. Laissez ensuite refroidir l’eau.
  • Il est toujours préférable d’aller cueillir la menthe poivrée dans son jardin si on en a la possibilité. Si vous avez de la menthe poivrée, allez donc en chercher un gros bouquet.
  • Placez la menthe poivrée dans le bocal refroidi, et tassez-la le plus possible ; c’est bien qu’un peu de jus sorte de la plante. J’ai personnellement utilisé un pilon pour cette étape. Vous pouvez remplir le bocal à moitié, voire aux 3/4.
  • Cette étape est facultative, mais j’ai personnellement rajouté une cuiller à soupe d’inuline, une fibre qui va favoriser le développement des lactobacilles. J’en reparlerai plus bas.
  • Recouvrez ensuite la menthe avec l’eau salée et refroidie, jusqu’en haut du bocal pour retirer un maximum d’oxygène ; si le bocal déborde un peu à la fermeture, c’est parfait.
  • Laissez ensuite ce bocal 10 jours à température ambiante, ce qui permettra le développement des lactobacilles.
Menthe fermentée/culture de lactobacilles

Voici à quoi ressemble la menthe fermentée après ces dix jours ; dans la photo ci-dessus, il s’agit d’une culture que j’ai déjà utilisée et à laquelle je viens de rajouter un peu de menthe ; on la distingue clairement car elle a ses couleurs d’origine. La menthe au fond du flacon est complètement fermentée.

Préparation de la boisson finale

  • Dans une bouteille à fermeture mécanique ou dans un distributeur à limonade, placez quelques branches de menthe (poivrée, verte etc.) ou de n’importe quelle autre plante aromatique que vous souhaiteriez (verveine, mélisse etc.).
  • Prélevez un peu de liquide dans la culture de lactobacilles/mère (1/2 dl à quelques dl pour plusieurs litres de préparation) et placez-le dans le contenant choisi.
  • Ajoutez 2 cuillers à soupe de sucre par litre de boisson et complétez avec de l’eau.
  • Refermez le contenant et laissez fermenter 2 à 3 jours. Plus le contenant est gros, plus il faut se rapprocher des 3 jours. La fermentation exalte les arômes des plantes qu’on ajoute et permet d’acidifier naturellement la boisson. Le tout est de la consommer quand le goût est le plus plaisant.
Boisson à des stades différents de fermentation

Dans la photo ci-dessus, la bouteille de droite vient d’être préparée et celle de gauche en est à 24h de fermentation.

Boisson avant fermentation

Préparation initiale avec un distributeur de limonade.

Et voici le produit fini après 3 jours de fermentation.

Une fois que la fermentation est terminée, il faut mettre la boisson au frais et la consommer dans les jours qui suivent ; lorsque j’utilise un distributeur de limonade, je transfère le contenu dans des bouteilles d’un litre et je recommence une nouvelle fermentation.

Quelques conseils pratiques et entretien de la culture de lactobacilles

Il faut bien se rappeler que la culture de lactobacilles et la boisson finale sont des produits vivants et que là est tout l’intérêt. Mais cela suppose que la culture soit alimentée régulièrement pour garder la même efficacité. Après avoir prélevé un peu de liquide de la mère pour fabriquer la boisson, il faut compléter avec un peu d’eau et refermer le bocal. On peut le garder à température ambiante quelques jours, pour encourager les bactéries à se reproduire. Il faut aussi les alimenter de temps en temps. Il m’arrive donc de rajouter un peu de menthe et parfois de la renouveler complètement. D’autres fois, je mets simplement un peu de fibres prébiotiques (une cuiller à café) qui servent aussi de nourriture aux lactobacilles (quelques exemples ici, sur un site de vente de compléments alimentaires).

Notez aussi que tous les contenants à fermeture mécanique ne sont pas totalement étanches. La fermentation par les lactobacilles génère des gaz qui exercent une certaine pression. Il est prudent de mettre une soucoupe sous les contenants durant la fermentation, au cas où du liquide s’échapperait un peu. Notez aussi qu’en raison de l’accumulation de gaz, il est préférable de mettre la culture de lactobacilles ou la boisson finie quelques heures au réfrigérateur avant de l’ouvrir, pour contracter un peu ces gaz et éviter d’asperger tout ce qui se trouve aux alentours lors de l’ouverture.

Bulles de gaz se formant durant la fermentation

Pour ce qui est du goût, il faut faire des tests. La boisson préparée avec de la menthe verte et fermentée 3 jours à un goût proche du thé glacé à la menthe, en un peu moins sucré. J’ai testé avec de la verveine et on obtient un goût qui rappelle beaucoup le Kefir. Je fais souvent des mélanges de différentes plantes et j’ai donc aussi utilisé de la sauge ananas, diverses menthes ou encore un peu d’achillée millefeuille.

Le sucre va servir à la fois comme base de fermentation et pour sucrer la boisson. Je trouve personnellement que l’équilibre est très bien après 3 jours. Si vous voulez une boisson moins sucrée mais qui fermente tout aussi bien, il est possible de substituer tout ou partie du sucre par de l’inuline ou une autre fibre prébiotique dont j’ai parlé plus haut.

Bref, cela laisse une large place aux goûts personnels et à la créativité !

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